Qu’est-ce que le Reeperbahn sinon un festival qui permet de (re)découvrir les clubs autour de la mythique rue du vice, mais aussi et surtout des artistes encore inconnus ? Avec ses nombreuses conférences, ce festival avant tout destiné aux professionnels n’en était pas moins mon préféré de tous lorsque j’habitais dans la capitale hanséatique. Et lors de la session 2018, j’ai fait le plein de nouveautés, à commencer par The Courettes. Comme le souligne leur petit « slogan », ce duo sonne comme un quatuor tant il est explosif. Problème déjà annoncé dans mon article à ce sujet : je n’ai rien vu de leur concert lors du Reeperbahn festival et pour y remédier, le rendez-vous a été pris pour le 20 octobre 2018 au Pooca Bar. Minuscule établissement de la survoltée Hamburger Berg, il transpirait le charme underground ce soir-là.
Anecdote du siècle...
…que je me remémore assez souvent depuis. Le concert débute avec plus d’une demi-heure de retard, et qui plus est avec une première partie. Certes, on est samedi soir et on a le temps, mais quand même. La lassitude naît d’une trop longue attente. « Ich hab’ kein Bock auf die Vorband », dis-je plusieurs fois à mes potes en soupirant. Surprise, mes bâillements ont été aussitôt déjoués par le rock qui envoie du bois de The Cave Riot, petit groupe local.
Soudain, entre deux chansons, le chanteur lance à « Hi Klaus » à un vieil homme qui venait de me frôler en se tracant un chemin vers le bar. Une bonne partie du public répond par des petits cris de sympathie du style « wow wow » ponctués de quelques applaudissements en tournant la tête vers le Monsieur. J’ai tout de suite compris : environ 80 ans et célèbre à Hambourg, il était forcément lié aux Fab Four. En rentrant chez moi, j’ai recherché « Klaus Beatles Hambourg » et suis tout de suite tombée sur le visage désormais familier de Klaus Voormann. Incroyable ! Ce musicien et producteur allemand était non seulement très proche des Beatles, mais en plus de cela il l’est resté pendant longtemps puisqu’il a joué de la basse sur les albums solos des anciens membres et a enregistré un trio avec Macca et Ringo Starr en 2009.
À juste titre, vous allez trouver mon engouement bien ridicule, mais je reste persuadée qu’on est vivant si on a la capacité de s’émerveiller des choses en apparence les plus anodines. Transformer les petits moments en grands souvenirs, c’est ça avoir gardé son âme d’enfant, c’est ça être passionné. Or pour moi, frôler un ami intime du plus grand groupe de tous les temps, c’est tout sauf insignifiant. Ce souvenir prend d'ailleurs une dimension particulière quand on connaît mon attachement à la ville de Hambourg qui n’a fait que s’épaissir depuis que je l’ai quittée.
Bref, revenons-en aux Courettes !
Une fois la super mise en bouche des Cave Riot terminée, les Courettes prennent place et envoient le pâté. Alors les Courettes, c’est quoi ? Et bien la recette est pour le moins inhabituelle : une chanteuses-guitariste brésilienne et son compagnon danois aux fûts. Son look est en accord avec la musique : tout droit sortis des sixties. Le son est garage bien crade comme on l’aime, le volume est fort et les morceaux sont entraînants.
Le public, largement composé de
Britanniques (ou d’Anglais même ? - est à fond. Comme d’hab. Moi qui
arpentait régulièrement les clubs de la ville pour sautiller sur des petits
concerts de rock indé, je peux vous assurer que Hambourg a bien de la chance –
dans ce contexte, et uniquement dans ce contexte, pas dans la rue, avec ces
hordes de jeunes célibataires à l'alcool violent venus fêter des enterrements de vie de garçons à
St. Pauli – d’être la ville allemande qui compte le plus de Britanniques. Les
Allemands du Nord étant chiants comme la pluie, j’ai maintes fois remercié dans
ma tête nos ennemis d’outre-Manche toujours bourrés et défoncés, car au moins on pouvait compter sur eux pour assurer une ambiance survoltée aux concerts.
Bref, c’était génial et il nous a fallu quelques instants pour redescendre sur Terre une fois les derniers riffs envoyés. Le pauvre couple a bien galéré à nous renvoyer à la maison après un dernier morceau improvisé, ou devrais-je dire "forcé" par les cris de la foule. Lors de la petite séance de débriefing au Burger King qui a suivi, nous n’avons malheureusement pas pu répondre à la question que tout le monde se pose, à savoir « que fait une femme aussi canon avec un boudin pareil ? ». Mis à part les traditionnelles explications de l’oseille ou du gros membre, nous n’avons rien trouvé.
Peu importe, on écoute The Courettes, parce que ce sont de tels petits groupes talentueux et pleins d’énergie qui nous laissent une vague lueur d’espoir. Le rock n’est pas mort.
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