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mardi 20 mars 2018

Sortez-moi le bon vieux féminisme du garage !

Dream Wife



Par cet hiver, ce gel, cette déprime, cette morosité interminables, rien de tel pour réchauffer ses nerfs endoloris que l’incandescence d’un groupe de garage-rock féminin comme on n’en fait plus. Trois jeunes londoniennes enragées : deux sympathiques butchers qui balancent des riffs puissants et irrésistibles accompagnés de paroles féministes vociférées par une fausse lolita blonde. 
 

Bref, un petit - minuscule - air des Slits dirais-je timidement, bien incapable de citer un autre groupe féminin similaire.


Ce « girl power » band, c’est comme un truc « à l’ancienne », ça vous ramène à la fin des années 70, vous avez l’impression de connaître, mais non. C’est nouveau et impossible de trouver un équivalent passé, malgré des clins d’œil à certaines chanteuses marquantes (ex : un « one way or another I'm gonna get ya, I'll get ya get ya get ya get ya get ya » au milieu d'une chanson et le « I tell you what I want, what I really really want » du titre FUU).
Six petites semaines après la sortie de leur premier album, les punkettes nous ont fait l’honneur de passer par l’une des villes les plus rock que je connaisse, qui plus est dans mon club préféré.


Concert du 14.03.2018 au Molotow, Hambourg

Si j’ai du mal à trouver à Dream Wife une ressemblance avec un groupe en particulier – leur son me rappelant tout au plus les Stooges (ici la formidable intro de FUU)

 
et la Patti Smith de Horses -, il en va autrement de la première partie ce soir-là. Avec wearemarvin, c’est comme si The Strokes avaient fait des cochonneries pendant quelques dates de tournée en Allemagne et que leurs fils sortaient tout à coup de l’ombre. Pour l’enfant du merveilleux revival rock des années 2000 que je suis, cette mise en bouche pré-Dream Wife a été un véritable plaisir. Moi qui n’aime pourtant pas les premières parties et arrive toujours en retard pour les louper, je ne regrette pas l’exception faite.


Pendant l’entracte, nous sommes allés fumer des clopes et surtout nous rafraîchir dans note chère cour du Molotow. Il faisait chaud dans cette salle. Tellement chaud. Comme dans tous les clubs de Hambourg, quel que soit le temps à l’extérieur. Je me rappelle les cris des petits Lemon Twigs obligés de se mettre torse-nu pendant de leur concert à l’Indra-Club en avril 2017 : « And before we all die from heat ».
Alors pour finir d’enflammer tout ça, le truculent trio débarque avec Hey Hearbreaker aux riffs entêtant. Ce morceau étant de loin le meilleur de l’album, autant dire qu’on nous a mis dans l’ambiance sans ménagement. 

 
Les chansons s’enchaînent, le public bouge bien et ça sautille sans arrêt sur la scène. Le groupe est en nage et déclare même avoir plus chaud qu'à Sidney où il a joué la semaine passée.
Trop plein d’énergie, de jeunesse qui exulte, quel pied ! Les slogans féministes fusent au milieu des paroles sans équivoque, comme dans cet hymne au respect de la femme où "I am not my body, I am somebody" fustige l'objectivisation de celle-ci.


Puis arrive en milieu de concert le « moment préféré » pour la chanteuse : celui où elle exhorte toutes les « bad bitches » de la salle à venir aux premiers rangs, et demande ainsi pendant trois plombes - puisqu’ils n’ont pas l’habitude de laisser leur place – aux mecs de « get the fuck away ». Sur fond de solidarité féminine si chère à leurs yeux, elles clament ainsi leur fierté d'être des « bad bitches » pendant la très explicite FUU. Ironie du sort : mis à part quelques rares couples lesbiens et filles "normales" dans mon genre, l'immense majorité du public est composé d'hommes. N'oublions pas que le rock - et à plus forte raison le punk - est un genre masculin très viril ; d'où le regrettable manque de filles au sein des groupes.


L’ensemble n’aura pas duré plus d’une heure, même si je n’ai bien évidemment rien chronométré. Le meilleur sauna du monde s’est terminé trop vite car il ne faut pas oublier que les demoiselles n’ont sorti qu’un album. Alors dans une apothéose de féminisme véhément - et ouvertement anti-mecs, vous l'aurez compris -, les amazones punk ont invité une poignée de gonzesses des premiers rangs à monter sur scène pour danser sur les dernières saillies punk.

Mon Dieu que c’était bon ! Le genre de concert qui vous revigore pendant les jours qui suivent. L’hiver peut continuer de nous les briser, rock and roll is not dead.

vendredi 3 juin 2016

La plus belle nuit du reste de ta vie (enfin presque)

Tout avait pourtant très mal commencé en ce 27 mai 2016 à Hambourg. Une journée au bureau d’un ennui abyssal à peine comblée par la lecture d’articles tous plus futiles les uns que les autres sur le fameux demotivateur.fr, des filles du groupe Facebook « Neu in Hamburg » aux photos de profil pourtant fort sympathiques qui, après des réponses et messages empreints de la plus grande motivation à sortir ce vendredi…me plantaient. Tout simplement. Et avec des excuses tout aussi pourries que leur motivation de la veille fût grande : « Je suis malade, je pensais que ca allait passer, alors j’ai rien dit, mais là je suis clouée au lit ». Réponse souhaitée et bien évidemment non envoyée : « dans ce cas crève, connasse ». Autre exemple représentatif de l’autisme profond des habitants de cette grande ville du nord où le superficiel et le manque d’engagement règnent sans pareil sur les relations humaines : « Ah si tard ? Ah mais je n’y arriverai pas je dois travailler jusque tard aujourd’hui ». Réponse souhaitée et bien évidemment non envoyée : « Tard ? Parce que tu fais la fête le weekend de 21h à 23h toi ? (Connasse aussi) ». Bref, ca allait encore se finir à deux avec « Küken », soit poussin en VO, qui est certes un peu beaucoup silencieux, mais presque toujours partant du haut de ses 21 printemps, d’où son surnom.

Le début de la soirée était calme. Piste déserte, comme toujours au Molotow aux alentours de minuit et gens qui boivent des bières tranquillement sur les chaises longues de la cour intérieure. Ce soir-là un DJ posté dans la petite cabane de la cour passait des trucs indies sympas. J’ai même reconnu « Sur la plage » de La Femme et m’en suis vantée auprès de Küken dans un élan un peu con de chauvinisme, comme à chaque fois que je reconnais un groupe français en club. Il faisait 10 degrés à tout casser et pour mon pote du Schleswig-Holstein, la température était chaude. Des gonzesses déjà joyeuses après quelques bières (oui ici l’un ne va jamais sans l’autre, le balai dans le cul que les Allemands doivent supporter toute la semaine ne se retire pas tout seul à l’eau gazeuse) commencent à bien s’amuser entre elles et dansent dans la cour. Oh mon Dieu ! Une soirée entourée de poules en pleine « soirées filles » ! Quelle horreur. Et puis tout à coup mes pieds étaient trop gelés pour que je souhaite poursuivre ce moment détente à l'extérieur. Alors avec Küken nous décidons conjointement de finir nos bières à l’intérieur. Dans un (bref) premier temps,  nous ne faisons pas trop attention à la musique et constatons avec satisfaction que la piste s'était pas mal remplie. Nous nous posons sur les canapés dans un coin et poursuivons la soirée pendant quelques instants en mode relax, mais cette fois en silence puisqu'on s'entendait plus. Quand tout à coup je regarde Küken en souriant et lui dis que c'est quand même trop bien. Et là j'ai vu à son sourire que notre jeune homme d'habitude si introverti était plus qu'agréablement surpris. Alors nous nous sommes levés...


...pour ne presque plus jamais nous rassoir, ni même aller aux toilettes. De toutes façons, elles sont dégueulasses au Molotow. Il faut y aller dès le début de soirée (et encore elles sont déjà à la limite du supportable) ou plus jamais. Les titres s'enchaînent, les uns sur les autres, parfaitement mixés comme s'ils avaient été composés par consentement mutuel pour pouvoir être mixés ensuite. La foule est compacte, mais suffisamment espacée pour que chacun puisse bien se déchaîner sur un tel talent. Alors que les corps des clients des clubs voisins de St. Pauli bougent en position debout pour accompagner l'alcool qui les pénètre, eux se font accompagner par un peu l'acool pour mieux se laisser pénétrer par la musique. Que ce soit pendant ou une semaine après, aucune idée de l'heure à laquelle tout a commencé et donc de la durée de cette transpiration intense et (presque) ininterrompue, tout simplement parce que des moments aussi exceptionnels se vivent hors du temps. Le jeune DJ encore à peine connu dans le Nord de l'Allemagne vit son truc du début jusqu'à la fin et le transmet à la petite foule. Elle ne s'arrête de danser que pour quelques secondes de récupération sur le canapé ou pour un bref passage au bar. Elle sourit en fermant les yeux, elle ne drague ni ne se torche et encore moins se drogue. Elle n'est pas venue pour ça, le son est parfait et le kiff qu'il engendre se suffit à lui-même. Hip-hop allemand ou américain, funk et rock indé, French touch et RnB : tout est si parfait. Je n'ai moi-même, pourtant assez grosse fêtarde depuis une bonne dizaine d'années, jamais autant transpiré et aimé une set-list.

Comme toutes les bonnes choses ont une fin et que bizarrement Küken et moi nous rendons compte que ça doit faire un moment qu'on est là et que la salle se vide (très) légèrement, nous sortons, en eau. Et là, BIM ! La lumière du jour nous aveugle et nous pouvons à peine ouvrir les yeux. Putain mais quelle heure il est ? 4:30...
Alors pour tous les crétins occidentaux éternels insatisfaits comme moi en quête aussi vaine que perpétuelle du bonheur, foutez-vous bien ça dans le crâne même si je sais que vous le savez : il n'existe pas. Il n'y a que des moments de bonheur qui ne sont donc par définition PAS des moments de bonheur, mais de joie. Ces moments n'arrivent jamais si vous cherchez à les provoquer et surtout si vous y pensez. En revanche, ils vous tombent sur la gueule là où vous êtes bien "dégoûtés" (pas malheureux, puisque le malheur n'existe pas non plus, cf. deux lignes plus haut pour les étourdis). Et attention, quand ils arrivent, ils vous transportent dans un autre espace-temps et finissent inévitablement par vous reposer là où ils vous ont pris, mais pas tout à fait dans le même état car ils vous laissent le bien le plus précieux d'une vie humaine : un bon souvenir.

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