jeudi 3 août 2017

Le festival au goût amer

Festival itinérant créé dans les années 90 par le leader de Jane's Addiction pour faire la promotion de son groupe et mettre en avant la scène grunge et alternative américaine, Lollapalooza n'a désormais d'underground que les origines. Perry Farrell doit être fort peiné de l'avenir pour le moins dénaturé de sa créature. Les choses lui échappent autant qu'à nous, mélomanes amateurs de vrais concerts, tandis que le mastodonte américain propriété de Live Nation devient le symbole d'une destruction de la culture au profit du pur profit, comme l'a très justement dénoncé l'éternel ministre de la culture français, passé à l'immortalité suite à son invention du pire affront jamais commis à l'égard de la musique : le 21 juin...

Rendons toutefois à César ce qui est à César : il a entièrement raison. Quelle ne fût pas non plus ma surprise d'apprendre que mon cher Rock en Seine avait lui aussi vendu son âme à l'oncle Sam. 
Soit. Le capitalisme est roi et loin de moi l'idée de le remettre en cause ni de prôner un quelconque protectionnisme (quoi que, l'exception française fonctionnant très bien pour l'industrie du cinéma). En revanche, j'ai mon mot à dire sur la destruction du concept même d'authenticité opérée par des géants américains, à l'instar de ce terrible Lollapalooza. Affiche plus qu'alléchante pour cette première parisienne : The Hives, Imagine Dragons, The Pixies, Lana del Rey et même les Red Hot. Ni une ni deux, je me suis ruée sur la billetterie. Pauvre de moi, car mon rêve d'ado rock des années 2000 (enfin !) réalisé




n'a su apaiser le goût amer laissé aussi bien par les prestations que le festival dans son ensemble. Passons sur l'organisation déplorable : navettes de retour insuffisantes et bloquées par les taxis et VTC, files d'attente de plus d'une heure pour les toilettes des filles, et surtout absence de temps de battement entre deux concerts sur les deux scènes principales. Grand seigneur, je préfère mettre ces balbutiements sur le compte de l'inexpérience puisqu'il s'agissait là du premier Lollapalooza parisien. Ma grande bonté atteint alors ses limites lorsque je repense aux mesures de sécurité on-ne-peut plus maigres dans la capitale d'un pays en état d'urgence et gangrené par le terrorisme islamiste. À en croire les multiples camions de gendarmes qui filaient vers Paris pendant notre pre-drink du dimanche au parc de Saint-Cloud,


Bouteille cachée derrière un arbre et retrouvée le lendemain. Temps fort hors festival :)


les forces de sécurité semblaient trop mobilisées pour l'arrivé du Tour de France. Et les gilets jaunes présents sur le site n'étaient-ils pas plus utiles à papoter entre eux et dragouiller au lieu de faire leur boulot et fouiller correctement ? À la décharge de l'organisateur, une série de concerts aux portes de Paris, avec 60 000 festivaliers dont 50 % d'étrangers bourrés et habillés plus courts les uns que les autres venus voir de nombreux artistes américains, ça n'a absolument pas l'air d'une cible idéale pour djihadistes. Du tout.

Mais ce qui m'a le plus chagriné est ailleurs. Tout semblait fake : des concerts sans âme pour la plupart, où des artistes trop américains (comprenne qui pourra, ou voudra) enchaînent les tubes pour un public trop composé de moutons gonflés aux réseaux sociaux qui n'attend qu'une chose : dégainer son smart phone pour avoir le plus de likes possible sur Insta. Paroxysme du spectacle désolant des influenceurs non mélomanes : le nuage de portables parsemé de petites putes juchées sur épaules aux premières notes de Wonderwall, pourtant entamées à reculons par un Liam Gallagher plus énervé que jamais. Cauchemar réitéré avec le Where Is My Mind final du concert chiant à mourir des Pixies. Heureusement, la Mylène Farmer américaine, ce soir-là déguisée en Amy Winhouse, nous a offert un gros lot de consolation. On dit merci qui ? Merci la rareté de princesse Lara, sans laquelle cette dernière aurait perdu en chaleur humaine. Sans compter la sublime mise en scène.





Et Dieu sait si la couleur (oh ça de la couleur, y en avait pardi !) était pourtant annoncée dès l'entrée sur le site avec cette reproduction de la Tour Eiffel pour bien enfoncer le clou "Hey! We are in Paris!" en carton-pâte prêt-à-instagramer...

En conclusion, je devrais songer à ma Haute-Marne d'origine pour l'été prochain. Festival organisé par une association locale, un lac, de jolies têtes d'affiche. Bref. La vie est ici.




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